LISBONNE (Portugal) - Développer les marchés du basket-ball. Chaque fois que l'on demande quel marché le basket européen doit développer le plus, les premiers noms que l'on entend sont Paris, en France, ou Londres, en Angleterre. Souvent suivis d'une liste des plus grandes villes du continent. Et bien sûr, tout cela est vrai, la croissance du jeu dans ces endroits serait sans aucun doute bonne pour le sport. Cependant, un pays et un marché que l'on oublie peut-être - voire que l'on néglige - est le Portugal et, pour être plus précis, dans le cas présent, S.L. Benfica. Ce grand club sportif compte plus de 250 000 membres et environ 14 millions de fans dans le monde. Si ce n'est pas un marché ayant le potentiel de développer le sport sur ce continent, alors qu'est-ce qui l'est ?

Comme le club de football, le club de basket Benfica est historiquement le plus titré du Portugal. Il compte 82 titres nationaux (ligues, coupes, supercoupes) et est, bien sûr, le champion en titre du Portugal. C'est également le club du premier joueur portugais drafté dans l'histoire, Neemias Queta. L'âge d'or du club se situe sans aucun doute dans les années 80 et 90, lorsque le club a remporté 10 titres nationaux et a participé régulièrement à la Coupe des clubs champions, enregistrant des victoires contre des poids lourds comme le Panathinaikos, le Real Madrid et le Partizan. On pourrait dire qu'un nom avec le pedigree sportif de Benfica a sa place dans une telle liste, mais dans un passé récent, le club de basket n'a pas été en mesure de mettre en place une équipe capable de le faire. Il n'y a que la saison 2019/20 qui a vu Benfica échouer de peu dans les qualifications de la BCL. Si l'on en croit le début de la saison 2022/23, peut-être, juste peut-être, que ce type d'équipe arrive enfin à Lisbonne.

2022/23

En incluant les tours de qualification de la BCL de cette année, Benfica a commencé la saison avec huit victoires et zéro défaite toutes compétitions confondues. Tout a commencé par une victoire très confortable 92-67 sur Golden Eagle YLLI. Jose Barbosa a marqué 15 points à 71% de réussite aux tirs et Terrell Carter a marqué 15 points et pris 5 rebonds, ce qui a permis à tout le monde de savoir quel genre de problèmes il allait poser aux défenses. L'équipe suivante était Keravnos de Chypre, une équipe qui sait ce qu'il faut faire pour atteindre la saison régulière. Keravnos a certainement proposé un test plus difficile mais finalement le résultat n'a jamais vraiment été remis en question. A partir du deuxième quart-temps, Benfica a mené pendant 23 minutes et a dominé dans toutes les catégories statistiques. La plupart des dégâts ont été causés par les 20 points d'Ivan Almeida et les 36 points du banc.

Le dernier boss des tours de qualification qu'il fallait vaincre était Brose Bamberg et les Allemands sont exactement le genre de club que l'on aurait pu attendre en saison régulière. Mais Benfica et Ivan Almeida ont eu d'autres idées. Le Capverdien a inscrit 39 points et pris huit rebonds pour permettre à Benfica d'entamer la saison régulière par une victoire surprise 87-73.

Ivan Almeida a été monstrueux en finale du tournoi de qualification contre Brose Bamberg

La saison régulière a vu l'ensemble du roster monter d'un cran. Lors du match d'ouverture contre VEF Riga, cinq joueurs ont scoré à deux chiffres : Toney Douglas (17), Ivan Almeida (16), Aaron Broussard (15), Betinho Gomes (12) et Maik Zirbes (10). Ces efforts combinés leur ont permis d'inscrire 89 points à l'extérieur, avec une réussite aux tirs de 52 %, mais surtout 41 % de loin (nous y reviendrons). Les 44 points marqués dans la peinture sont également à noter. En fait, tous leurs paniers réussis l'ont été dans la peinture ou au-delà de la ligne à 3-points. Le score final de 76-89 en faveur des Portugais est le reflet plus qu'exact d'une performance totalement dominante et d'une performance dans laquelle Benfica a conservé l'avantage pendant tout le quatrième quart-temps.

La victoire sur la route à Limoges qui a suivi a offert un contraste frappant. L'équipe de Norberto Alves a dû gratter et racler pour sortir vainqueur. Une fois de plus, ils ont eu quatre joueurs à deux chiffres : Broussard (17), Gomes (15), Almeida (12) et Terrell Carter (10). Ils ont aussi très bien tiré de loin avec 39% de réussite avec 13 réussites à 3-points, mais la représentation parfaite de la victoire est peut-être le fait que Toney Douglas n'a inscrit qu'un seul tir dans le match (sur huit tentatives), mais ce tir a été celui de la victoire. Cette équipe est parfois rusée, mais elle montre aussi qu'elle a du cran quand elle en a vraiment besoin.

Il est vraiment trop tôt pour tirer des conclusions des données de la saison jusqu'à présent. Nous n'en sommes même pas au stade où chaque équipe a joué deux fois, mais... En fait, il n'y a pas de mais. Nous voulons juste souligner que Benfica a réussi 40 % de ses tirs longue distance sur plus de 30 tentatives au cours de ces deux matchs de la saison régulière et qu'il a tout aussi bien shooté au cours des tours de qualifications. C'est clairement une équipe qui peut mettre dedans. Leur évaluation nette de 10,9 points par 100 possessions les classe juste derrière BAXI Manresa et Galatasaray Nef parmi les équipes qui ont joué deux fois.

Comment ils jouent

Aussi bon que soit le Benfica sur le plan offensif, il serait dommage de ne pas s'intéresser à sa façon de jouer en défense. Cette équipe est en tête de la ligue aux interceptions, avec une moyenne de 13,5 interceptions par match jusqu'à présent. Cette moyenne va très certainement baisser au fur et à mesure que la saison avance - seul Monaco en 2017/18 a eu une moyenne de plus de 10 interceptions sur une saison complète - mais quoi qu'il en soit, il est logique de commencer par ce qui a fonctionné pour générer autant d'interceptions pour Norberto Alves et l'équipe (indice, la connexion capverdienne d'Almeida et Gomes sont deux raisons majeures).

Sur presque chaque possession défensive, vous allez voir Benfica essayer de récupérer le ballon pas plus loin qu'à mi-terrain. Cette équipe est grande, rapide et pleine de joueurs qui veulent se placer dans les couloirs de passes. À chaque fois qu'ils se replient sur le terrain, ils veulent empêcher le joueur qui reçoit le ballon de traverser la moitié du terrain sans au moins le forcer à faire un demi-tour. Une fois qu'ils ont fait tourner le joueur, ils sont excellents pour rétrécir le milieu du terrain et ensuite lire les yeux pour voir où se trouve la passe évidente. Parfois, surtout lorsqu'Ivan Almeida est impliqué, il leur suffit d'un seul défenseur pour causer de sérieux problèmes à l'attaque.

C'est aussi une équipe qui presse furtivement tout-terrain. Ils ne pressent pas souvent, mais lorsqu'ils le font, le résultat minimum qu'ils obtiennent est une perturbation et ils poussent parfois l'adversaire à aller au bout de l'horloge. Dans le clip ci-dessous, nous les voyons presser, trapper, puis une fois que Limoges s'échappe, il ne reste que 10 secondes au chronomètre le temps qu'ils puissent organiser une attaque. Ensuite, regardez comment le numéro 96, Ivan Almeida, se détache de son homme lorsqu'il est battu en sortie de dribble et lit instantanément que la passe va aller là où l'aide défensive est venue. De là, il a la longueur et la rapidité pour arriver à temps pour faire l'interception. Betinho Gomes, l'autre Capverdien de l'équipe, joue également au poste d'ailier et est tout aussi doué pour ce type d'action. À eux deux, ils ont réalisé en moyenne neuf de ces 13,5 interceptions jusqu'à présent.

Sur le plan offensif, Benfica est principalement une équipe de demi-terrain. Selon Synergy, 88% de leurs possessions sont utilisées sur jeu demi-terrain. Cependant, cela ne veut pas dire qu'il s'agit d'une équipe qui se contente de marcher et de shooter au poste. Loin de là. Zirbes et Carter jouent environ 20 minutes chacun au poste de pivot et Makram Ben Romdhane est le joueur qui se rapproche le plus d'un ailier fort traditionnel, mais même dans ce cas, il est assez polyvalent pour jouer sur le périmètre.

Cette équipe utilise le poste mais principalement pour créer. Dans ses 12,7 minutes sur le terrain, Romdhane produit 2,5 passes décisives (ce qui est élevé). La quasi-totalité d'entre elles proviennent de passes au poste ou à l'intérieur. Presque toutes les équipes utilisent le poste pour les passes de l'intérieur vers l'extérieur, en particulier vers les shooteurs. Les passes intérieures nécessitent un peu plus de chimie et de timing. Le fait que les joueurs de Benfica se trouvent déjà régulièrement à l'intérieur à ce stade précoce de la saison est un excellent signe pour Norberto Alves.

Comme nous l'avons dit, c'est loin d'être une équipe lente. C'est beaucoup plus une équipe qui veut jouer large, avec du spacing, et entrer dans son attaque le plus tôt possible. Leur action la plus efficace jusqu'à présent cette saison a été un simple "Drag Screen" (pick-and-roll en transition) avec un coin vide côté ballon. Cela leur permet de modifier l'angle de l'écran et de mettre leurs créateurs comme Toney Douglas et Aaron Broussard en position d'attaquer la défense avant qu'elle ne puisse se mettre en place.

Le prochain système "Horns" nous donne une bonne idée de la façon dont cette équipe opère lorsqu'elle ne peut pas attaquer les équipes en début d'attaque ou en semi-transition. Regardez comment le numéro 32, Carter, échappe à l'écran et sprinte vers le cercle. Maintenant nous avons Carter dans la peinture et quatre joueurs de périmètre autour de lui, avec les deux coins remplis. Le numéro 1, le défenseur de Broussard est obligé de venir bumper pour empêcher une passe facile pour Carter, donc Broussard se lève pour rendre la passe plus courte et la sortie du défenseur plus longue.

Nous voyons plus ou moins la même chose avec ce système "Diamant" dans le clip suivant. Cette fois-ci, le numéro 33, Zirbes, est le passeur et la passe va vers le côté faible alors qu'il attire la défense vers lui sur le roll. La passe n'est pas possible et il n'y a pas de tir ouvert. Pas de problème pour Benfica, ils se lancent directement dans un autre pick-and-roll. #Le numéro 23, Douglas, lit la défense et trouve Zirbes avec une passe courte.

Ce dernier clip est l'une de leurs meilleures exécutions de la saison. Lorsque Douglas attrape le ballon sur l'aile, au lieu de faire un écran porteur, Carter fait un écran sur le défenseur de Broussard qui était coincé. Cela crée un couloir de drive pour Broussard qui déstabilise la défense. Almeida part en dribble et trouve Gomes qui s'est replacé dans le coin opposé. C'est exactement le type d'action qui illustre comment cette équipe génère un pourcentage élevé de tirs derrière l'arc.

Prochain match

BAXI Manresa est le prochain adversaire de Benfica et ce pourrait être son véritable moment de "Bienvenue dans la Basketball Champions League". L'équipe d'ACB a été finaliste la saison dernière et si aucun match n'est facile à ce niveau - surtout pas les déplacements en Lettonie et en France - cette équipe représente sans aucun doute le défi le plus difficile à relever. En termes de style de jeu, il y a plus que quelques similitudes. Comme Benfica, Manresa va essayer d'attaquer le plus tôt possible et de trouver des espaces avec ses pick-and-roll implacables au large. L'équipe de Pedro Martinez est également très active dans les couloirs de passes sur le plan défensif et a réalisé une moyenne de 10 interceptions jusqu'à présent. L'avantage des Espagnols réside dans le nombre de fois où ils ont été capables de générer de l'attaque en transition. Et ce, notamment en raison de la fréquence et de l'efficacité avec lesquelles ils ont utilisé leur presse tout terrain cette saison. Le coup d'envoi sera donné à 18h30 CET au Pavilhao Fidelidade le 25 octobre. Ce sera aussi la première occasion pour les fans de Benfica de montrer qu'ils peuvent aussi créer une grande atmosphère de basket européen.