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18/04/2019
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Le retour des rois - gros plan sur Iberostar Tenerife

SAN CRISTOBAL DE LA LAGUNA (Espagne) - Flashback au début du mois de mai 2017. Le Santiago Martin se préparait à accueillir son premier événement basket majeur. Après s'être rebaptisé sous le nom de CB 1939 Canarias en 1994, le club aujourd'hui connu sous le nom d'Iberostar Tenerife avait gagné son accession en ACB, et son plus grand fait d'arme était un quart de finale de la Copa del Rey. Dans la Basketball Champions League, les Canariens ont frappé le mille avec leur première fléchette. En tant qu'hôtes, ils ont atteint et remporté leur première grande finale contre Banvit, devenant ainsi les tout premiers vainqueurs de la BCL.

Comme c'est souvent le cas avec une nouvelle équipe sportive qui gagne, la victoire a entraîné la perte de plusieurs figures importantes de l'équipe : Marius Grigonis (MVP du Final Four) a déménagé à Alba Berlin, Aaron Doornekamp à Valence, Georgios Bogris est rentré en Grèce et Olympiacos, Will Hanley a remplacé le soleil par le soleil à Porto, et même Txus Vidorreta, entraîneur, a été débauché par Valencia Basket. La colonne vertébrale de l'équipe, cependant, est restée en grande partie inchangée. Javier Beiran, Rodrigo San Miguel, Ferran Bassas, Nicholas Richotti, Mamadou Niang, Davin White et Tim Abromaitis sont tous de retour cette année à Anvers.

La route vers le Final Four

En tant que club, la volonté de Tenerife de conserver un noyau fort et cohérent a largement contribué à son succès récent. Tout comme leur politique de recrutement. Des joueurs comme Nicolas Brussino et Sébastien Saiz ressemblent à des joueurs de Tenerife dès qu'ils marchent sur le terrain avec ce maillot jaune. Colton Iverson, au pivot, s'inscrit parfaitement dans le moule de Bogris, Vazquez et Tobey avant lui - une présence pour attraper des lobs, poser des écrans, comme les autres avant lui. Il est aussi un passeur sous-estimé.

Le retour de l'entraîneur Txus Vidorreta est peut-être aussi important que celui d'un membre de l'équipe ou d'une nouvelle recrue. Sous Nenad Markovic et Fotsis Katsikaris, Tenerife a toujours joué ce style estampillé offensif, mais aux deux extrémités du terrain, Tenerife n'a jamais retrouvé sa vraie identité sans Vidorreta aux commandes.

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Ce n'est pas seulement une question d'apparence. Depuis le retour de Vidorreta, les résultats sont très similaires. En 2016/17, Tenerife a dominé la saison régulière, terminant 11-3. Le 12-2 de cette saison a été tout aussi dominant. Au cours de la première saison, deux de ces trois défaites ont été de 4 points ou moins. Cette saison, ces deux défaites de la saison régulière ont été de 3 points au total. Les deux manches de Play-Off ont également été similaires. Au cours des deux saisons, les hommes de Txus ont remporté deux de leurs quatre matches à élimination directe avant de se qualifier pour les demi-finales. En 2016/17, ils ont vaincu un adversaire grec (PAOK) en huitièmes de finale.

Ils ont ensuite passé l'étape des quarts de finale face à l'Asvel. Cette année encore, ils ont éliminé un club grec (Promitheas) en huitièmes de finale, mais cette fois, ils ont dû effacer un retard de 12 points, après leur pire performance de la saison à Patras. Les quarts de finale ont vu Tenerife affronter son adversaire le plus coriace de la saison (peut-être de son histoire en BCL), l'Hapoel Jerusalem. Partis d'Israël avec un retard de 2 points à combler, les Aurinegras ont réalisé une démonstration de force au match retour.


A l'issue de l'une de leurs performances les plus complètes de l'histoire de la Basketball Champions League, les premiers rois ont vaincu l'équipe que beaucoup de gens voyaient comme favoris cette année. Cette saison, Tenerife s'est distingué par son manque relatif de scoreurs individuels. Contre Jérusalem, Tim Abromaitis s'est efforcé de réfuter cette thèse. L'Américain a terminé la manche à domicile avec 21 points et 9 rebonds pour ramener les Canariens au Final Four (en remportant le titre de MVP des quarts de finale).

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Mais comme c'est toujours le cas avec Iberostar Tenerife, l'ensemble était beaucoup plus grand que la somme de ses parties. Une fois, il se peut que Ferran Bassas intervienne quand l'équipe a besoin de lui. Une autre fois, c'est Seba Saiz qui fait les dégâts. Ce n'est peut-être pas toujours un joueur qui fournit la réponse, mais cette équipe a le don de trouver le joueur qui a l'avantage et de le mettre en mesure de l'exploiter.

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Statistiques

Lorsqu'on compare le profil statistique de l'équipe cette saison, on constate beaucoup de similarités avec la saison du titre.


En 2017, les Canariens sont entrés dans le Final Four classé premier à l'Offensive Rating et deuxième au Defensive Rating. Ils ont également été classés premiers à l'efficacité aux tirs (eFG%) et le pourcentage de passes décisives. Cliquez sur les onglets dans l'historique des données ci-dessus, et vous verrez qu'ils sont allés encore plus loin cette fois-ci. D'abord sur l'attaque et la défense, voyez leur 20 points de mieux que leurs adversaires pour 100 possessions en 2018/19. Ils sont à nouveau les premiers à l'efficacité au tir aussi bien qu'au pourcentage de passes décisives, mais cette fois ils ont ajouté le pourcentage de rebonds à leur liste de premières places.

S'ils ont eu un point d'interrogation sur le plan statistique au cours de l'une ou l'autre saison, il pourrait s'agir des ballons perdus. Ils se classent au dernier rang parmi les quatre dernières équipes pour ce qui est du pourcentage de balles perdues, soit 15,2 %. Tenerife jouer une basket en mouvement et l'une des conséquences de passer le ballon est le risque de le rendre à l'adversaire. Ils jouent à 67,8 possessions par 40 minutes (le niveau le plus bas de la ligue) donc leur total de balles perdues n'est pas aussi élevé que celui des autres clubs, mais pour réussir dans le Final Four, ils devront certainement prendre soin du ballon.

Si nous plongeons un peu plus profondément et explorons leurs données au cours de leurs 10 derniers matchs menant aux demi-finales, nous constatons que le rythme et les pertes de balles sont un thème récurrent, mais peut-être pas aussi percutant que prévu.

La victoire de Tenerife à l'aller contre Promitheas a été, en fait, leur pire performance des dix derniers matches en termes de pertes de balles (ils ont perdu le ballon sur 27,2% de leurs possessions). Si vous cliquez sur l'onglet Pace et effectuez une recherche dans les filtres de l'histoire de données ci-dessus, vous pouvez naviguer pour voir le Pace de Tenerife pour chaque journée. Seulement deux fois vous constaterez qu'ils ont joué un match avec plus de 70 possessions par 40 minutes. Tous deux étaient des matches retour de Play-Off, et tous deux ont été marqué par de larges victoires. En fait, chaque fois que Tenerife a joué un match au-dessus de sa moyenne de la saison en terme de possessions, le résultat a été une victoire.

Bien sûr, Tenerife gagne des matchs en ralentissant le rythme et en shootant plus efficacement que ses adversaires, mais peut-être que l'histoire des adversaires qui tentent d'augmenter le rythme et d'accélérer cette équipe, n'est pas une tactique basée sur les faits. L'autre tendance à remarquer est le bilan de Tenerife de 3-2 dans les matchs dans lesquels ils ont laissé plus de 110 points pour 100 possessions. Cette équipe est connue pour sa faculté à shooter à 3-points, mais dans la course vers le Final Four, leur performance défensive a eu un plus grand impact sur la victoire.

Bien sûr, nous ne pouvons pas parler de Tenerife et des statistiques sans regarder le tir........

Tenerife a été décrite comme l'ambassadrice en Europe du " Morey-ball " (du nom de Darryl Morey des Houston Rockets) parce qu'elle aime tirer de derrière l'arc ou près du cercle - avec une préférence pour les tirs à 3-points dans le corner à fort pourcentage. Quand vous voyez le graphique ci-dessus, vous pouvez voir que les chiffres renforcent cette réputation.

Puis regardez à nouveau le graphique ci-dessous, et vous verrez que Tim Abromaitis est un grand contributeur au profil de tir de Tenerife. Il mène l'équipe au pourcentage au tir depuis les deux corners. Ce chiffre de 83 % dans le coin droit est accrocheur, mais potentiellement trompeur. Il est à 5/6 de cet endroit qui est peu fréquenté et volatil. Le fait qu'il tire à plus de 50 % à deux endroits différents derrière l'arc est loin d'être trompeur. L'Américain est certainement le scoreur le plus mortel des quatre derniers matches.

Nicolas Brussino est devenu un rouage encore plus important lors des Play-Offs. Ses tirs depuis les ailes ont été tout aussi mortels. Les 80% de Mamadou Niang près du cercle proviennent presque exclusivement de dunks. Le big man a été une présence décisive pour Tenerife en finale en 2017. Avec les qualités athlétiques d'Ismael Bako, attendez-vous à le voir jouer un plus grand rôle dans la demi-finale de cette année. Plus longtemps il restera là pour couvrir Bako en défense, plus nous avons de chances de voir Niang Airlines décoller et déployer ses ailes.

Roster

Avant les quarts de finale, nous avons examiné la façon dont Txus Vidorreta a utilisé son effectif tout au long de la saison. Si nous comparons la rotation dans cet article avec le tableau ci-dessous pour les rotations de Tenerife lors des Playoffs, nous pouvons voir des différences claires. Au cours de la saison régulière, Vidorreta a eu deux unités claires pour les quarts-temps un à trois, mais a ensuite été beaucoup plus fluctuant dans le quatrième. Dans les Playoffs, nous voyons aussi une première et une deuxième unité clairement définies. Il y a toutefois eu quelques ajustements. Lucas Staiger a été dans le cinq en l'absence de Javier Beiran et Nicolas Brussino a été remplacé dans le cinq de départ.

Pour aller plus loin, Colton Iverson, Nicolas Brussino et Tim Abromaitis ont été presque toujours présents dans l'équipe démarrant et terminant les matchs. Il est intéressant de noter que Ferran Bassas a été régulièrement sollicité dans les dernières minutes, et souvent dans une équipe à deux arrières avec Rodrigo San Miguel. La capacité de cette équipe à passer d'un configuration à l'autre est ce qui fait d'elle une machine si défensive.

Les deux équipes les plus efficaces de Tenerife au cours des Playoffs ont été :

Davin White, Colton Iverson, Nicolas Brussino, Rodrigo San Miguel, Tim Abromaitis  (Net Rating: +9 points pour 100 possessions).

Ferran Bassas, Tim Abromaitis, Colton Iverson, Nicolas Brussino, Lucca Staiger (Net Rating: +9 points pour 100 possessions).

Le fil conducteur de ces deux formations est constitué par les trois mêmes joueurs : Colton Iverson, Nicolas Brussino et Tim Abromaitis. Nous pourrions choisir n'importe quel nombre de joueurs à examiner de plus près, mais ces trois hommes, en particulier, ont joué un rôle majeur dans le retour de Tenerife au Final Four.

Colton Iverson

 

C'est une chose d'être grand. C'en est une autre de jouer grand. Nous avons vu Colton Iverson mettre en place des écrans maousses, gober des rebonds contestés et attraper des lobs toute la saison. Ce que nous l'avons vu faire contre l'Hapoel Jérusalem était une performance dominante. Iverson a régné sur le match quand il était sur le terrain. La frontline de Jérusalem est mobile et athlétique, mais il les a fait paraître petits grâce à sa capacité à dominer. Dans les deux premiers clips de la vidéo ci-dessous, vous voyez Jérusalem essayer de jouer Iverson. La première fois, il sort au large et se repositionne à l'intérieur après le renversement de balle. Puis dans le deuxième clip, regardez comment il utilise sa force pour déplacer Josh Owens et créer de l'espace avant la passe.

Aussi, gardez un oeil sur le mouvement de Tim Abromaitis sans la balle dans ce deuxième clip. Jérusalem voudrait venir en aide pour la passe en lob vers Iverson. Le mouvement d'Abromaitis brouille les lignes entre les responsables de cette aide. Le dernier clip montre sa force brute, car il commence à l'extérieur de la peinture avant les tirs d'Abromaitis. Au moment où le tir est enclenché, Iverson s'était déjà frayé un chemin jusqu'au cercle et a réussi à se faufiler entre deux défenseurs.


La partie méconnue du jeu d'Iverson est sa qualité de passe. Toute la saison Tenerife a été en mesure de compter sur lui pour ressortir le ballon vers les shooteurs sur des short roll ou lorsque la défense se resserre. Les deux dernières passes laser dans cette prochaine vidéo, sont parmi les meilleures que vous verrez chez un big man cette année.

 

Nicolas Brussino

Flash info, Nicolas Brussino peut shooter. Non, il sait vraiment, vraiment shooterr. L'Argentin a joué 54 matchs de saison régulière pour les Dallas Mavericks dans la saison 2016/17, puis a passé quelque temps dans la G-League avant de passer à Gran Canaria. Il ne s'est jamais vraiment installé lors de son premier arrêt aux îles Canaries mais il semble très bien installé sous la direction de Txus Vidorreta. En 20 minutes, il tire à 46% de loin sur 3,6 tentatives et à 70% dans l'arc de cercle. Ses 9 points par match ne sont pas impressionnants au premier abord, mais si vous calculez ses chiffres sur 36 minutes, ses 16,2 points, 6,4 rebonds, et 3 passes sont une productivité exceptionnelle. Dans la vidéo ci-dessous, vous voyez ce qui le rend dangereux : c'est qu'à 2,03 m, il peut tirer au-dessus de vous, mais il est aussi assez mobile pour sortir en transition et battre les joueurs sur son dribble (le prototype de la recrue de Tenerife).


Défensivement, Brussino correspond également au profil. Dans le premier clip de la vidéo suivante, regardez comment il utilise d'abord sa longueur et la vitesse de son pied pour forcer Saloustros à effectuer une mauvaise passe. Puis dans le deuxième clip, il vient en aide sur le joueur qui roule au cercle, puis reste devant Butler en fin de possession et se sert de sa longueur pour perturber le tir. Dans les deux clips, son jeu de jambes et son positionnement corporel sont excellents.

 

Tim Abromaitis 

Nous avons déjà exploré le fait que Tenerife ne gagne pas de matchs sur les épaules d'un joueur star, mais si un joueur est la pièce la plus importante pour le style qu'il joue, ce doit être Tim Abromaitis. Il joue en tant que poste 4 au large et sa capacité à rivaliser avec les grands en défense, puis à les emmener derrière les écrans pour shooter à 3-points en attaque est ce qui le rend précieux.

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😤 @TimAbro put up 21PTS & 6REB to help @CBCanarias move to the #BasketballCL Final Four!

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L'autre élément souvent inaperçu mais vital pour le jeu d'Abromaitis, c'est la façon dont il peut switcher et défendre contre des joueurs plus petits. Le clip ci-dessous résume parfaitement cette capacité. L'action commence avec Tenerife en transition. Abromaitis reconnaît le mismatch et se rapproche rapidement de Langston Hall. L'arrière de Promitheas attaque l'intervalle. Les aides d'Iverson et d'Abromaitis empêchent Hall d'atteindre le cercle. Abromaitis switche ensuite sur Nikos Gikas. Regardez comment l'Américain lit les pieds de Gikas sur le pas de côté et vient parfaitement gêner le tir.

 

Tactique

Nous avons presque tout dit sur Tenerife sur le plan tactique. Qu'il s'agisse de l'exécution après les temps-morts :



Ou après remises en jeu


Nous savons que cette équipe peut bouger le ballon et nous savons qu'elle est polyvalente et perturbatrice sur le plan défensif. C'est une équipe qui a l'habitude de rendre les choses compliquées simples. Ils ont élaboré un plan d'action qui donne parfois l'impression que peu importe à qui ils s'adressent sur le terrain ou, en fait, contre qui ils jouent. En termes simples, les joueurs d'Iberostar Tenerife ont été les rois de l'exécution du plan en 2017. Ce qui fait peur, c'est qu'ils se sont même améliorés en 2019. Pour marquer ce point, voici une session de passes supplémentaires en 2 minutes :

 

Le prochain adversaire

Telenet Giants Antwerp.

En deux saisons de BCL, les hôtes des Final Four sont à 2-0 ; dans une saison incroyable pour le basket-ball belge, les hommes de Roel Moors et les 18 500 fans du Sportaleis d'Anvers espèrent faire 3-0 ; s'il y a une équipe sur qui on parie pour casser l'avantage du terrain, ce serait Iberostar Tenerife de Txus Vidorreta.

D'un autre côté, s'il y a une équipe qui peut jouer avec l'imprévisibilité pour perturber le flow de cette équipe de Tenerife, ce sont probablement les jeunes d'Anvers. Les Canariens devront utiliser toute leur expérience et leur esprit collectif pour passer l'obstacle de la plus jeune équipe de la BCL. Attention au match des meneurs entre Ferran Bassas et Paris Lee, et la bataille à l'intérieur avec Ismael Bako contre Colton Iverson, Sébastien Saiz et Mamadou Niang.

Diccon Lloyd-Smeath

Diccon Lloyd-Smeath

Diccon is a basketball coach and analyst living in Madrid. Constantly digging in the crates of box scores and clicking through hours of game footage. Diccon is on the hunt for the stories within the stories. If you like to get a closer look at what’s going in the Basketball Champions League, you have found it.